Appel à contributions – no. 46 « Grandir / Growing Up »

Appel à contributions

n° 46 (automne 2025)

Intermédialités. Histoire et théorie des arts, des lettres et des techniques

Intermediality. History and Theory of the Arts, Literature, and Technologies

Sous la direction de :

Grandir

Changement d’état, transition, rencontre avec des normes, premières fois. L’enfance et l’adolescence, des catégories ayant une fonction sociale et historique, sont des espaces propices à des formes d’inventivité scénaristique et formelle, ainsi que des territoires dans lesquels des discours sur le rôle des médias se développent, précisant les manières de penser ces derniers dans nos cultures. L’attention pour le processus de grandir et ses mises en récit favorise le développement de réflexions riches sur diverses pratiques intermédiales : la relation texte-image, texte-son, image analogique-image numérique, par exemple.

Ce numéro d’Intermédialités / Intermediality se propose d’explorer les manières par lesquelles le cinéma, la télévision, la littérature et les médias numériques racontent et donnent forme au parcours délicat qu’est le fait de grandir. De quelles façons une perspective transhistorique, transculturelle et intermédiale nous permet-elle de mettre à jour et de déconstruire la notion de récit d’initiation ?

Moment paradoxal de négation — « l’adolescent.e n’est ni enfant ni adulte » (Bourdieu 1980, Vultur 2021), le passage de l’enfance à l’âge adulte permet aux créateur·trices de raconter des histoires capables de dévier d’une perspective hétérocentrée, coloniale, ou balisée par des normes perçues comme stables et absolues. En effet, si grandir peut correspondre à une « émancipation », il est important de démystifier la portée universalisante du concept de « bien grandir ». Ainsi, certains contenus ratissent de manière critique le développement linéaire de l’humain, en démystifiant le processus de grandir par rapport aux pressions de conformité et d’adéquation à la norme, de productivité et de performance, y compris celle de l’atteinte du « bonheur » (Ahmed 2010). Certains récits, également, portent sur des situations dans lesquelles la possibilité de grandir est interdite, où le sujet ne veut pas grandir, ou encore questionnent la portée politique et le potentiel radical de la désobéissance (Gros 2018, Didi-Huberman 2021).

Pensons à la littérature du 18^e, quand apparaissent les premiers livres pour « former » les enfants; ou encore au 20^e, quand le cinéma muet et le cinéma d’animation s’orientent vers les enfants. Aussi, cette période de transition rejoint bien la notion d’indiscipline de la télévision (Uricchio 2020), et plus spécifiquement les récits complexes de la sérialité télévisuelle contemporaine, étalés sur plusieurs épisodes et propices à des formes d’errance, de vulnérabilité et d’hésitation. Plus largement, à l’image de l’éclectisme culturel observable dans les jeunes générations (Glevarec 2013), les récits sur l’enfance et l’adolescence questionnent massivement les frontières entre les médias, les narrations hybrides y amalgamant fréquemment diverses formes artistiques (cinéma, télévision, littérature, productions vidéoludiques, romans graphiques, vidéoclips, collage, etc.). Lorsqu’on s’intéresse aux représentations de l’enfance et aux œuvres destinées aux enfants, des questions de hiérarchie des médias se posent. Celles-ci nous encouragent à penser la relation entre élite et marchés de niche en littérature ainsi qu’au sein des médias audiovisuels, de même que les transformations de ces relations à travers les époques.

Dans le même cadre, on pourra étudier certaines pratiques médiatiques spécifiques et leur impact : la place des réseaux sociaux, du binge watching, de l’IA dans l’éducation et dans les devoirs, les jeux en ligne multijoueur comme espaces communautaires ou sources d’isolement, ou encore la programmation (coding) et la création audiovisuelle en ligne. Ces phénomènes se prêtent à des analyses intermédiales, et peuvent se nourrir des approches issues des humanités numériques. Nous pouvons également aborder, dans ce cadre, le rôle de la technologie et la présence de l’écran comme gardien (pensons aux discours sur la télévision comme « bonne » ou « mauvaise » « institutrice »), afin de comprendre la médialité comme une présence qui affecte le processus de grandir.

« Grandir / Growing Up » vise donc à réunir des spécialistes de plusieurs domaines afin d’étudier les trajectoires de croissance dépeintes dans les médias, en se confrontant aux tensions que ceux-ci construisent entre passé, présent et futur. L’objectif du numéro est donc d’offrir un aperçu des manières dont ces normes s’établissent, d’approfondir les connaissances concernant la représentation des pratiques culturelles et médiatiques qui caractérisent la période de croissance et, enfin, de mettre en évidence des alternatives critiques et créatives, dans une perspective transhistorique, transculturelle et intermédiale.

Les propositions d’articles (350 à 400 mots) doivent être acheminées avant le 19 juillet 2024 aux adresses suivantes : marta.boni@umontreal.ca et boisvert.stefany@uqam.ca. En plus du résumé de la proposition, une bibliographie préliminaire (cinq livres ou articles) ainsi qu’une brève notice biographique (programme d’études, champs d’intérêt, 5 à 10 lignes) sont demandées. Les propositions seront évaluées par le comité scientifique de la revue, en fonction de l’originalité de l’approche et de la pertinence de la problématique.

Les articles définitifs seront à soumettre le 15 janvier 2025. Ils devront avoisiner les 6 000 mots (40 000 caractères, espaces compris) et pourront comporter des illustrations (sonores, visuelles, fixes ou animées), dont l’auteur·e de l’article aura pris soin de demander les droits de publication. Il est demandé aux auteur·e·s d’adopter les normes du protocole de rédaction de la revue, disponible à l’adresse suivante :
[FR] http://cri.histart.umontreal.ca/cri/fr/intermedialites/protocole-de-redaction.pdf
[EN] http://cri.histart.umontreal.ca/cri/fr/intermedialites/submission-guidelines.pdf

Bibliographie