Numéro 44, Automne 2024
Édité par María Andrea Giovine, Susana González Aktories et Roberto Cruz Arzabal
La position du corps dans le domaine esthétique n’est pas un élément statique, mais un processus en constante évolution. En optant pour le verbe « incorporer » dans ce numéro d’Intermédialités, le corps se retrouve au cœur des réflexions critiques sur les pratiques et perspectives intermédiales. Le verbe « incorporer », par son étymologie, implique la distinction d’au moins deux entités matérielles, ainsi qu’un mouvement d’assimilation ou d’intégration de l’une par l’autre. Ce mouvement implique également l’introduction d’un élément extérieur dans l’espace interne du corps. Le corps étant également une source d’innombrables métaphores et images du monde humain, il n’est pas surprenant que l’introduction d’une chose dans une autre – même dans un sens métaphorique – soit également considérée comme une incorporation. Le terme « incorporer » fait également référence aux processus par lesquels une technique artistique est subsumée dans une autre ou par lesquels deux ou plusieurs médias ne font plus qu’un. La présence du corps dans un autre média et les utilisations des médias en relation avec le corps sont des formes incorporées de relations intermédiales. L’incorporation peut aller jusqu’à l’homologation, la subsomption, l’intégration partielle ou l’absorption totale. Dans le domaine de l’expérience, elle prend le sens d’appropriation ou de réappropriation.
Ce numéro définit trois perspectives significatives dans l’étude de l’embodiment et du corps dans le contexte des études sur l’intermédialité. La première est phénoménologique et explore le sensorium et ses interactions avec les matérialités de la communication et les processus de perception. La deuxième s’appuie sur les études culturelles pour aborder des questions telles que la production de soi à travers différents médias, y compris dans le travail des artistes autochtones. Enfin, l’approche cognitive intègre une compréhension scientifique de la manière dont le cerveau perçoit et crée des objets artistiques à des questions humanistes concernant la signification culturelle et le rôle humain fondamental de l’art. Ensemble, les articles considèrent des œuvres littéraires, les arts du spectacle et les beaux-arts tels qu’ils sont pratiqués dans différentes parties du monde, tout en traitant du corps en tant qu’instance médiatrice qui crée, expérimente, décode et interagit avec le monde.